Cela devait bien faire trois mois que j'étais rentré à la maison. Home sweet home qu'on disait, et pourtant, ce lieu ne m'était jamais apparu aussi peu accueillant qu'à l'heure actuelle. Trop de souvenirs, bons, comme les plus mauvais.  Mais pour le coup, j'avais nul part ailleurs où aller. A peine arrivé que je me trouvais déjà dans le salon, laissant tomber mon sac par terre. Deux ans, déjà. Deux ans passés loin d'ici, et pourtant l'endroit était resté inchangé. Ils avaient au moins pris la peine de nettoyer avant de m'emmener c'est déjà ça, mais parfois certaines traces restes, les traces qu'on ne peut pas voir. J'aurais cru que l'appart serait vendu, mais non. Pas facile quand on sait ce qu'il s'y est passé.
Avec le temps, j'en ai profité pour faire à mon un peu de rangement, réorganiser l'espace pour lui donner un coté neuf, presque changé, que rien ne puisse me rappeler ce qu'il était avant. Plus facile à dire qu'à faire bien évidemment, mais cela suffisait au moins à donner un minimum de personnalité à l'endroit. Rien de plus que de déplacer les meubles.
Le plus dur finalement n'aura pas été de se refaire à l'endroit, c'est plutôt à la vie en général. En deux ans tant de choses semblaient s'être passées. Plus que jamais j'avais cette sensation d'être une sorte de prisonnier coupé du monde, qu'on vient enfin de relâcher une fois que le monde n'est plus ce qu'il était autrefois. Prisonnier de quoi ? De qui ? Pourquoi ? Cela faisait encore beaucoup trop de questions restaient. En voilà une autre de bonne.

Les journaux n'arrêtaient pas d'en parler, c'était un peu le nouveau chou-gras des médias. Une sorte de vaisseau venu d'on ne sait où s'était posé à New York. Les hommes verts attaquaient. C'était le seul mot à la bouche des gens, impossible de sortir sans entendre quelqu'un en parler. Enfin... pour ce que je sortais. Je préférais éviter. Trop de monde, trop de risques. Mais je devais bien l'avouer, cette histoire m'intriguait. Peut-être qu'un peu d'air ne me ferait pas de mal après tout, il suffisait d'être prudent, ne toucher personne. Juste le temps d'enfiler une veste et j'étais déjà dehors, à descendre les escaliers. Il suffisait de rejoindre les abords de l'Hudson pour déjà voir les gens s'attrouper près de ce qui semblait être le vaisseau. Tout ce monde, impossible de s'approcher pour voir. Entre les gens de passages pour travailler et les curieux. Je restais à l'écart. M'approcher c'était risquer de contaminer quelqu'un. Non, il fallait être plus malin. Un petit détour par les quais, juste une échelle à descendre pour se retrouver au plus près des docks et de l'eau. Ici la vie était imprenable et diablement tranquille.

« Mais qu'est ce que c'est que ce truc ? »

Indescriptible, géant, et ne ressemblant à rien de connu. Voilà les seuls mots qui me venaient en tête. Je tentais encore de m'en approcher. Certains disaient qu'ils avaient vu plusieurs personnes en descendre, des humains, mais comment l'homme pouvait fabriquer une telle chose ? Les russes ? Déjà en avance à ce point ? Un mouvement, la bête s'anime. Ou plutôt, ce qui semble être une porte s'ouvre. Le réflexe, se cacher. Ne pas se faire voir. Adossé contre un petit renfoncement dans le mur, j'attendais ; que quelqu'un passe, que la porte se referme, que je redevienne rationnel au lieu de me plaquer comme un fugitif, peu importe, j'aimais bien attendre, je le faisais si bien. Des pas, encore des pas, et si c'était le moment à mon tour de bouger?

Etais-je ridicule ? Probablement ? Etais-je un peu vexé ? Très certainement aussi. Petit. J'avais l'air vraiment si jeune que ça ? Toujours était-il que je n'avais pas fait preuve de beaucoup de malice. C'était sûrement la couverture la plus nulle que le monde de l'armée avait jamais connu. Il était temps de sortir de ma cachette. Je me décollais dur mur et me tenait face à la femme. C'était assez surprenant de la voir sortir comme ça de ce monstre en ferraille qui s'était écrasé dans le fleuve. Je la regardais dans les yeux, mais je ne réussissais pas à tenir mon regard et le détournait rapidement. A vrai dire je ne m'attendais pas à trouver quelque chose... d'humain, là-dedans.

« Ex... excusez-moi. C'était stupide. Je ne m'attendais juste pas à ce que quelqu'un sorte de cette chose. »

Je prenais soin de garder mes distances. Ca n'était pas tellement une aubaine finalement qu'une humaine sorte de cet engin. Mais maintenant j'avais des tas de questions qui venaient me trotter en tête, la chance peut-être de ce mini entretien particulier avec un des habitants de l'appareil. Alors que les autres s'entassaient contre les barrières pour essayer de comprendre ce dont il s'agissait, moi j'avais la chance de me retrouver au cœur de l'action, et pourtant c'était à peine si j'osais bouger.

« Est-ce que vous... venez vraiment de là-dedans ? »

Je laissais mon regard dévier vers le géant métallique. Comment appeler cette chose ? C'était aussi gros qu'un petit village, c'était déjà un miracle qu'il ait put se poser sans encombres.

« Enfin... je veux dire, d'où est-ce que vous venez? »